Bonjour à tous,

J'ai une question assez importante à mes yeux, pour un projet dans le futur proche.
Selon vous, où s'arrête la morale dans l'acte photographique, par rapport à l'humain ?
Est-ce que si un sujet est traité avec respect, la question de moral ou immoral n'est pas de mise ?

Merci,
Guillaume.

Qu'est qui est immoral pour toi ?
Ce qui l'est pour une personne ne le sera peut-être pas pour une autre.

Ce qui atteint les droits de l'homme est immoral selon moi, et ce sera sans doute différent pour d'autres.
En soit, ma question est plutôt : selon vous, où est-ce que la photo doit s'arrêter ?

Je prends des exemples bidons, mais est-ce que ce que fait James Nachtwey est immoral, répugnant et de mauvais goût, ou alors son témoignage a de la valeur parce qu'il le fait avec respect ?

Les limites peuvent être posées par ceux à qui tu t'adresses : galeriste, responsable de ta formation, éditeur, public ... Et elles varient selon le sujet abordé, et avec l'intention que tu mets dans tes images. Est-ce que tu photographies quelque chose que la société décrète "immoral" pour choquer, parce que tu y vois quelque chose d'intéressant, pour documenter ? Nachtwey est un journaliste, il photographie la réalité, aussi horrible soit-elle, pour la partager. Le respect de l'autre comme tu le dis joue beaucoup.
Je crois que les réponses à tes questions sont difficiles parce qu'il faut avant tout définir ce qu'est l'immoralité, et là ça devient de la philo !

C'est très tendancieux comme sujet ça.

La morale est somme toute depuis mai 68 devenue une notion très personnelle.

AMHA dans tout travail destiné à être montré/présenté ce qui est représenté touche ta sensibilité personnelle et donc tes propres limites. Ce qu'il faut prendre en compte c'est cet effeuillage de ton intimité, et ce qu'il livre de toi. Le plus dur étant d'accepter d'être jugé sur ses limites et non sur le travail fourni.

Un bon exemple tiré de mes expériences:

Il y a une dizaine d'années je travaillais en maison de retraite (hey faut bien payer les pelloches!), en parlant avec certains patients dont un photographe, un projet s'est monté avec toutes les autorisations. Et j'ai injecté des boitiers et un studio dans la structure. Le sujet de base des portraits a vite été oublié à la demande des sujets/participants pour des nus. Montrer ce que personne et surtout les jeunes refusent souvent de voir: l'impact du temps sur les corps.

Alors que le travail n'avait rien de "choquant" les nus étant très soft, pour "nous"confrontés à la nudité de l'age toute la journée, l'expo qui en a découlé a été fustigée par la presse puis démontée au bout de 3 jours...

Si je refesais la même aujourd'hui nous serions considérés comme des génies aux messages forts!

Bref à toi de voir tes limites et surtout de faire (avec tes partenaires: sujets, exposants...) une bonne étude de marché sur l'adéquation de ta proposition et du monde actuel.
Je pense que pour un sujet de frange/limite le mieux est de voir au fil de l'élaboration du travail le resssenti des "autres" sur l'angle que tu suis; quitte à te laisser en partie recadrer par ces regards extérieurs et à accepter quelques concessions (sans travestir ton travail ce qui es très très chaud!)

Blanc a écrit:...

Alors que le travail n'avait rien de "choquant" les nus étant très soft, pour "nous"confrontés à la nudité de l'age toute la journée, l'expo qui en a découlé a été fustigée par la presse puis démontée au bout de 3 jours...

Si je refesais la même aujourd'hui nous serions considérés comme des génies aux messages forts!

...

+1, il ya eu l'an dernier une exposition dans une galerie lyonnaise connue qui montrait des octogénaire nus et l'exposition a recueilli de nombreux lauriers des journaux et associations locales.

7 avril ?
Ah ça alors c'est ma date d'anniversaire !
Encore quelques années et je pourrais poser pour des photos de ce genre je vous promet de faire attention à ma ligne pour le reste je ne m"engage à rien je suis comme les copains...
Plus sérieusement comme le dit Hugo un peu plus haut tout est dans l'intention; je rajouterais dans l'intention et les destinataires du message.
La photo a ce privilège et ce handicap à la fois d'être un support artistique comme un vecteur de témoignages.
Ce privilège car elle permet les deux approches; Ce handicap car aux mains de gens sans foi ni loi elle devient un instrument de n'importe quoi.

Pour relancer ce sujet, il y a eu l an dernier ou y a deux ans une exposition sur Paris qui traitait ce sujet. Je viens d' emprunter a la médiathèque un livre intitulé: "Controverses : une histoire juridique et éthique de la photographie" de Girardin et Pirker. Je vais le lire en diagonale car ma durée d' emprunt s acheve et je ne l ai toujours pas lu!

J'ai vu il y a un an ou deux une expo à Bruxelles, appelée Controverse, avec du Capa, de l'Apartheid, et pas mal de truc dans le genre. Et il y a des moments où on se demande quand intervient l'implication du photographe.
Entre autre, j'ai vu le tirage original de la petite fille et le vautour, qui laisse pas mal de questionnements...